Nous ne le rappellerons jamais assez, la prudence s’impose face au licenciement d’un travailleur revêtu d’une protection particulière.
Il s’agissait en l’espèce d’un travailleur bénéficiant d’un congé parental, licencié par son employeur pour motif grave pour avoir manqué de respect à son supérieur hiérarchique et pour avoir établi des « manipulations frauduleuses et des faux en écriture » dans l’encodage des clients visités.
Ces faits, peut-être exacts, n’ont toutefois pas pu être prouvés avec certitude par l’employeur dans le cadre de la procédure judiciaire introduite par le travailleur.
Le seul élément de preuve apporté par l’employeur consistait, en effet, en un témoignage du supérieur hiérarchique dont question, lequel attestait d’une part de l’attitude irrespectueuse, agressive ou d’insubordination du travailleur et, d’autre part, des encodages délibérément inexacts.
Après avoir considéré que ladite attestation devait être prise avec circonspection, en ce qu’émanant du supérieur directement impliqué dans l’incident ayant notamment conduit au licenciement pour motif grave, la Cour estime que celle-ci est tout à fait insuffisante pour rapporter la preuve des faits démontrés. A tout le moins, le dépôt des encodages litigieux aurait été opportun.
Le licenciement pour motif grave n’est donc pas régulier en ce que les faits à l’origine de celui-ci ne sont pas prouvés par l’employeur.
La société ne prouvant pas les faits qu’elle allègue pour justifier le licenciement, il lui est de la sorte également impossible de démontrer que le congé est justifié par un motif suffisant dont la nature et l’origine sont étrangères au congé parental.
Or, un travailleur bénéficiant d’un congé parental est précisément protégé en ce qu’il pourra prétendre au paiement d’une indemnité de protection (six mois de rémunération) si son employeur est dans l’incapacité de démontrer que son licenciement est justifié par un motif suffisant et étranger au congé parental.
Ainsi, ne pouvant prouver la réalité des faits à la base du licenciement, l’employeur sera non seulement condamné au paiement d’une indemnité compensatoire de préavis mais également au paiement d’une indemnité de protection de six mois de rémunération.
L’impossibilité de prouver les faits n’aura donc pas eu pour seule conséquence le paiement d’une indemnité compensatoire de préavis.
A bon entendeur…
Source : C. trav. Liège, div. Namur, 24 août 2018, R.G. n° 2017/AN/124, inédit.