Le tribunal de police de Verviers a eu récemment à se prononcer sur la question de savoir si un litige portant sur l’application de l’article 14 de la loi du 21 novem-bre 1989 relevait ou non de sa compétence.
Les articles 13 et 14 de la loi du 21 novembre 1989 résultent de la transposition en droit belge de la IVè-me directive auto. Ces dispositions, en vigueur depuis 2003, imposent à l’assureur de prendre position sur la demande d’indemnisation que la victime lui soumet endéans un délai de trois mois.
L’article 14 vise l’hypothèse où l’assureur conteste les responsabilités ou le dommage de la victime. Si l’assu-reur n’a pas pris position endéans le délai légal, il est de plein droit tenu au paiement d’une pénalité forfai-taire de 250 € par jour :
« Cette somme est due à partir de celui des deux jours suivants qui viendra à échéance en premier lieu :
1° le jour où la personne lésée a rappelé, par lettre recommandée ou par tout autre moyen équivalent, à l’assureur l’échéance du délai visé au § 1er.
2° le jour où l’assu-reur a été averti par le Fonds commun de Garantie en applica-tion de l’article 19bis-13 § 1er, ali-néa 2, 1°.
Cette somme cesse d’être due le jour suivant celui de la réception de la ré-ponse motivée ou de l’offre motivée d’indemnisation par la personne lésée. »
Les conséquences financières résultant d’une absence de prise de position rapide peuvent être importantes pour les compagnies d’assurance.
La réclamation de la victime fondée sur l’article 14 puise son origine dans un accident de la circulation de sorte qu’il semblerait logique que la victime porte sa demande devant le tribunal de police. En effet, la volonté du législateur n’est-elle pas de déférer au tribunal de police tout le contentieux direct ou indi-rect résultant de cet accident ?
Néanmoins le contentieux qui porte sur l’application des articles 13 et 14 de la loi de 1989 concerne aussi les manquements à la procédure à respecter pour organiser la réparation d’un accident de la circulation, à savoir une réponse motivée de l’assureur, dans un délai déterminé, sur une demande d'indemnisation. Cette question d’ordre procédural peut être abordée distinctement de celle de l’indemnisation de l’acci-dent de la circulation.
Dans cette hypothèse, si la demande en paiement de pénalités en application de ces dispositions légales constitue l’objet principal de la demande en justice, elle doit dès lors être portée devant le tribunal de première instance même si un accident de la circula-tion est à l’origine de la réclamation.
Le tribunal de police ne sera donc pas matériellement compétent. La victime qui introduirait sa demande devant cette juridiction se verrait opposer un déclina-toire de compétence soit d’office par le tribunal soit de l’initiative du défendeur.
Par contre, si la demande de pénalités est accessoire à une demande principale fondée sur la réparation d’un accident de roulage, le tribunal de police pourra alors trancher cette question pour autant qu’un lien de connexité juridique unisse les deux demandes.
C’est en ce sens que le tribunal de police de Verviers s’est prononcé dans le jugement commenté :
« (…) en l’espèce, au vu du libellé de la citation, il ap-paraît clairement que l’obligation de paiement résulte des dispositions vantées à savoir la quatrième directi-ve transposée en droit belge par les articles 13 et 14 de la loi du 21/11/1989 pour absence de prise de posi-tion de la défenderesse dans le délai prescrit.
Le demandeur vise donc expressément une cause juri-dique propre, et ce, même si à l’origine de la situation entraînant cette demande de pénalité se trouve dans un accident de circulation et un dommage corrélatif indemnisable par ailleurs. (…)
En l’absence d’intervention législative, le tribunal de police dispose d’une compétence exclusive, dérogatoi-re du droit commun, qui doit s’interpréter de manière stricte par référence à la notion « de réparation d’un dommage résultant d’un accident de la circulation ».
Tel n’est pas le cas en l’espèce de la demande princi-pale, c’est à bon droit que la défenderesse sollicite le renvoi devant le tribunal de première instance de Ver-viers. »
Cette décision fait écho à un jugement du tribunal d’arrondissement de Bruxelles du 4 juin 2007 (R.G.A.R., 2008, n°14.342). Peu de décisions de juris-prudence existant sur cette question, il nous a sem-blé intéressant de commenter ce jugement de police.