L’ouverture d’un conflit a toujours une forte connotation émotionnelle dans le chef des protagonistes, quelle que soit la nature de celui-ci (professionnelle, syndicale, familiale, de voisinage, etc.). Même une procédure visant à obtenir le paiement d’une facture impayée peut se charger d’émotions au fur et à mesure de l’évolution du litige. La dispute ne peut pas rester émotionnellement neutre.
La procédure judiciaire structure le conflit et le « théatralise » en « mettant en scène » les acteurs du conflit et de sa résolution : les parties, les avocats, le juge, le décor, les habits, le vocabulaire utilisé, la manière d’échanger les arguments, ...
Lorsque les adversaires envisagent la procédure judiciaire, c’est qu'ils sont généralement déjà très loin dans leur opposition, ce qui, d’une certaine manière, les « aveugle » et aboutit à faire prévaloir le conflit pour lui-même. L’adversaire devient l’objet du conflit et non plus un acteur de celui-ci. Il faut souvent du temps pour que la charge émotionnelle s’atténue et que le conflit soit remis en perspective. Paradoxalement, l'écoulement du temps causé par l’arriéré judiciaire a, à cet égard, une vertu.
Du point de vue émotionnel, la frustration qui est à l’origine du conflit se trouve exacerbée, quelle que soit la décision finale. Au demeurant, la fonction de juger n’a pas pour objectif de réconcilier les parties. Elle vise à imposer une solution.
Les modes alternatifs de règlement des conflits (en abrégé, les « MARCs ») que sont la négociation raisonnée, la médiation, le droit collaboratif et la conciliation offrent une perspective différente aux parties en conflit. Ils supposent de pouvoir prendre du recul et se concentrer sur ce que l’on souhaite réellement.
Les « MARCs » proposent une approche stratégique dans la résolution des conflits. Ils impliquent de se projeter dans l’avenir et de réfléchir à la manière de régler le litige.
C’est une véritable gymnastique de l’esprit et, d’une certaine manière, un jeu de stratégie qui nécessite, pour avoir une vue claire de la situation, de s'intéresser à son adversaire, à ses besoins, à ses perspectives, ses points forts et ses faiblesses. Lorsqu'un avocat est consulté, il doit, de la même manière, s’intéresser à son client et à l'adversaire : quelles sont leurs contraintes respectives, leurs possibilités, leurs besoins et leurs intérêts ? Son rôle ne peut plus se limiter à une analyse purement juridique du litige. Quel serait en effet l’intérêt de mener un procès si l’adversaire n’est pas en mesure d’exécuter le jugement ? Sait-on seulement qu’en matière commerciale, 30% des jugements ne sont pas exécutés parce que l’adversaire n’en a matériellement pas ou plus les moyens ?
Les « MARCs » permettent de gagner autrement. C’est une invitation à la créativité, au mouvement. La confidentialité des négociations et du processus de médiation permet aux parties de s'exprimer plus librement et favorise l'émergence de solutions créatives. La procédure judiciaire est classique et son résultat est souvent aléatoire. Les « MARCs » sont déroutants et suscitent une perception différente de la réalité.
En ayant recours aux « MARCs », les parties ne sont plus les victimes d’un conflit mais deviennent les stratèges de sa résolution.