Kristof De Vulder est un avocat associé chez DLA Piper. Il a acquis une vaste expérience en matière de contrats d'outsourcing en représentant aussi bien des sociétés souhaitant avoir recours à l'outsourcing que des prestataires de services d'outsourcing. Il jouit d'une reconnaissance internationale en matière de contrats IT et d'outsourcing dans les différents guides professionnels des cabinets d'avocats d'affaires, notamment Legal 500, Chambers et Legal Experts. L'équipe de DLA Piper Bruxelles compte 10 avocats qui sont spécialisés dans le domaine des technologies et l'outsourcing.
Le recours à l'outsourcing a connu un important développement dans les dernières années et est aujourd'hui une pratique fortement répandue en Belgique. Quelles sont les dernières tendances en matière de contrats d'outsourcing que vous avez pu constater au cours de l'année 2009 ?
Le recours à l'outsourcing comme un moyen pour réduire certains coûts a connu une forte croissance depuis le début de la crise financière. En effet, le contexte économique actuel pousse de nombreuses entreprises à envisager l'outsourcing comme une sérieuse alternative. Pour les entreprises confrontées aux conséquences de la crise économique, les considérations financières sont souvent le déclencheur et le facteur prépondérant dans leur choix d'opter pour une délocalisation de certaines de leurs activités.
Cet objectif de réduction des coûts a eu également un impact sur le choix de pays de localisation de l'outsourcing. Cela constitue d'ailleurs une deuxième tendance. Les entreprises envisagent d'avantage l'offshoring, c'est à dire la prestation de services effectuée dans un pays d'outre-mer tel que l'Inde ou la Chine, mais aussi le nearshoring dans des pays plus proches tels que la Roumanie, où le coût de la main-d'œuvre est plus réduit. Beaucoup de projets d'outsourcing contiennent un élément nearshoring et/ou offshoring.
Une troisième tendance que j'ai pu constater au cours de cette année est la volonté très ferme de nombreuses entreprises de renégocier leurs contrats d'outsourcing existants, pour réduire leurs coûts à court terme. Des contrats qui avaient été conclus, par exemple, pour une durée de 5 ans sont renégociés après seulement 2 ans.
Quels autres impacts la crise financière a-t-elle eu en matière d'outsourcing ?
L'accent est d'avantage mis par les entreprises sur les économies rapides plutôt que sur la réduction structurelle et à long terme des coûts. Dans cette optique, la tendance est de conclure les contrats le plus rapidement possible afin de bénéficier immédiatement de cette réduction des coûts, ce qui ce fait parfois au détriment d'une analyse suffisante des coûts réels de l'opération envisagée. Cette tendance ne doit pas être encouragée car elle comporte des risques de revers importants pour les entreprises. Je constate aussi une attention beaucoup plus grande sur les clauses de sortie (exit) dans les contrats, c'est-à-dire la possibilité de mettre fin au contrat sans faute de l'autre partie et d'être accompagné de manière appropriée par le prestataire pendant cette transition. Les entreprises savent que ce qu'ils conviennent aujourd'hui risque de ne plus être adapté à leurs besoins de demain, vu les temps incertains actuels. Certaines entreprises ont eu la mauvaise expérience de se retrouver coincées dans un contrat qui ne leur convenait plus, sans avoir prévu la possibilité de sortir du contrat ou de revoir le volume des prestations. Les entreprises recherchent plus de flexibilité via des clauses de sortie appropriées, y compris pendant la durée du contrat.
Vous dites que de nombreuses sociétés souhaitent renégocier leurs contrats d'outsourcing à la baisse afin de faire face aux difficultés engendrées par la crise financière. Quelles mesures concrètes permettent aux entreprises de réduire le prix du contrat d'outsourcing ?
Les entreprises soucieuses de réduire leurs coûts disposent généralement de différents moyens pour demander la renégociation de leurs contrats d'outsourcing. Les contrats d'outsourcing contiennent en principes des clauses qui permettent une renégociation dans certaines conditions. Mais, même en présence de telles clauses, il faut toujours réfléchir en termes de solution win-win avec le prestataire de services. Imposer au prestataire de réduire ses coûts et ses prix à peu de chances de succès. Les clients qui sont proactifs et proposent des opportunités au prestataire auront plus de succès. La durée pour laquelle une entreprise souhaite s'engager est par exemple un élément important dans la négociation du prix du contrat. Une société disposée à conclure un nouveau contrat pour une durée de 5 ans est susceptible d'obtenir un meilleur prix que si elle ne s'engageait que pour une durée de 3 ans. Ensuite, les clauses pénales ou de responsabilité contraignantes pour le prestataire de services engendrent un risque financier plus important pour ce dernier, ce qui se traduit dans un prix plus élevé du contrat. La société qui accepte de revoir les montants des pénalités ou le risque de responsabilité du prestataire à la baisse dispose d'un argument supplémentaire lors de la négociation du prix du contrat. Une troisième opportunité qui se présente aux entreprises pour réduire le prix du contrat d'outsourcing se situe au niveau des délais de paiement. La société qui est disposé à payer 1 mois à l'avance au lieu de payer la facture à 30 voir 90 jours, est en mesure d'exiger de son cocontractant une baisse de prix considérable.