Le Tribunal de l’Union européenne a rendu, le 17 février 2011, un arrêt renforçant, dans une certaine mesure, les droits des spectateurs de foot
En vertu de la directive 89/552/CEE, relative à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, les États membres peuvent interdire la retransmission exclusive de certains événements qu'ils jugent d'une importance majeure pour leur société. Chaque pays de l’UE doit envoyer cette liste d’événements à la Commission, pour validation.
La Belgique et le Royaume-Uni ont dressé une liste des événements considérés comme ayant une importance majeure pour leur société. Ces listes contenaient notamment, pour la Belgique, tous les matchs de la phase finale de la Coupe du monde et, pour le Royaume-Uni, l'ensemble des matchs de la phase finale de la coupe du monde et du championnat européen. Ces listes ont été envoyées à la Commission qui a adopté en 2007 deux décisions favorables, considérant que ces listes étaient compatibles avec le droit de l’Union européenne.
Contestant le fait que tous ces matchs puissent constituer des événements d'importance majeure pour le public de ces États, la FIFA et l'UEFA ont attaqué ces décisions devant le Tribunal. Le manque à gagner est en effet significatif pour ces associations, dans la mesure où la vente des droits de retransmission télévisuelle de ces compétitions constitue une source importante de leurs revenus. Elles ont intérêt à ouvrir la vente des droits du championnat européen et de la coupe du monde pour faire grimper les prix.
La FIFA et l’UEFA critiquaient notamment le fait que la liste du Royaume Uni contienne des matchs n’impliquant pas l’équipe nationale de cet État membre.
Le tribunal de l’UE a distingué les matchs « prime » et les matchs « gala » de la coupe du monde ou du championnat européen (EURO), qui incluent notamment les demi-finales, la finale, les matchs d'une/des équipe(s) nationale(s) du pays concerné et le match d’ouverture. Les autres matchs de ces compétitions sont considérés comme des matchs « non prime » et « non gala.»
* Les matchs prime et gala relèvent à l’évidence, selon le tribunal, d’une importance majeure pour le public d’un État membre. Ils peuvent donc être inscrits sur la liste recensant les événements que le public doit pouvoir suivre sur une télévision à accès libre.
* En ce qui concerne les autres matchs de la coupe du monde et du championnat européen, le Tribunal a constaté que les chiffres d'audience concernant ces catégories de matchs des derniers championnats du monde et d'Europe démontrent qu’ils ont attiré un nombre important de téléspectateurs, dont une partie significative ne s'intéresse pas normalement au football.
Le tribunal a également pris en considération le fait que les résultats des matchs « non prime » et « non gala » peuvent avoir une incidence sur la participation des équipes aux matchs « prime » et « gala » ce qui peut susciter un intérêt particulier du public pour les suivre. Sur cette base, il a estimé que ces compétitions peuvent être considérées comme des événements uniques et non comme des successions d'événements individuels divisés en matchs « prime » et « non prime » ou en matchs « gala » et « non gala ».
Le tribunal a par ailleurs souligné qu’en l’absence d’harmonisation à l’échelon européen, des événements spécifiques peuvent être considérés par les États membres comme étant d’importance majeure, différentes approches en la matière peuvent coexister.
Eu égard à ces deux éléments, la Commission n’a pas, selon le Tribunal, commis d’erreur en estimant que la qualification par le Royaume-Uni de l'ensemble des matchs de la Coupe du monde et du championnat européen et par la Belgique de tous les matchs de la coupe du monde « d'événement d'une importance majeure » pour leur société est conforme au droit de l’Union. Le tribunal a rejeté les recours de la FIFA et de l'UEFA.
Le tribunal a donc considéré que la restriction à la liberté de prestation de service et à la liberté d’établissement était justifiée dès lors qu’elle vise à protéger le droit à l’information et à assurer un large accès au public aux retransmissions télévisées des événements d’importance majeure pour la société.
La probable déception de l’UEFA et de la FIFA doit être tempérée car, comme l’a relevé le tribunal, « si la qualification de la Coupe du monde et de l'EURO en tant qu'événement d'importance majeure pour la société peut affecter le prix que la FIFA et l'UEFA obtiendront pour l'octroi des droits de transmission de ces compétitions, elle n'annihile pas la valeur commerciale de ces droits puisqu'elle n'oblige pas ces deux organisations à les céder à n'importe quelles conditions ».