Le 31 janvier 2017, l’Autorité belge de la Concurrence a publié un Guide sur la collusion entre entreprises dans les marchés publics à l’attention des pouvoirs adjudicateurs.
Depuis sa création en 2013, l’Autorité belge de la Concurrence a fait des marchés publics une priorité de sa politique en matière de droit de la concurrence.
Toutefois, elle n’a à ce jour jamais adoptée de décision condamnant une entente illégale entre candidats dans le cadre d’un marché public alors que de telles décisions sont courantes en France.
Dénommée ‘bid rigging’, la collusion entre entreprises dans les marchés publics vise notamment à se répartir les marchés en coordonnant les offres déposées et/ou en fixant les prix de chaque candidat. Il y a lieu à cet égard de rappeler que le simple échange d’informations, par exemple sur le fait ou non de participer à un marché public, entre candidats potentiels peut constituer une infraction au droit de la concurrence.
Le Guide a pour objectif d’informer les pouvoirs adjudicateurs sur la définition de cartel et la notion de ‘bid rigging’ avec quelques exemples de formes courantes de cette pratique illégale telles que les offres de couverture, la suppression d’offres, la rotation des offres ou la répartition des marchés.
Le Guide fournit également aux pouvoirs adjudicateurs une liste de signaux d’alerte pouvant révéler l’existence éventuelle d’une entente illégale dans le cadre d’un marché public. Ces signaux peuvent concerner l’offre, les documents soumis, le prix, les déclarations d’entreprises ou le comportement des candidats.
L’Autorité a identifié les caractéristiques de certains marchés qui peuvent favoriser ce type de pratiques notamment lorsqu’ils concernent des produits ou des services identiques ou simples, lorsqu’il y a peu ou pas de substituts et que ces produits ne sont pas sensibles à l’innovation technologique.
Selon l’Autorité, les marchés publics répétitifs ou faisant l’objet d’une demande constante et prévisible présentent un risque plus élevé d’infractions au droit de la concurrence. Il en va pour les marchés susceptibles d’intéresser un petit nombre d’entreprises concernées, en cas de manque d’intérêt d’entrants potentiels ou de soumissionnaires qui se connaissent bien.
Par ailleurs, le Guide présente des conseils afin de réduire le risque de soumissions concertées. Ces conseils incluent la nécessité d’assurer la meilleure préparation possible du marché, l’ouverture la plus large possible des marchés, l’insertion de clauses anti-cartel dans les documents de marché, la communication restreinte d’informations, notamment sur les candidats potentiels, sur ce qui est considéré comme un prix adéquat ou sur le budget. En outre, l’Autorité conseille d’éviter les séances d’informations pour toutes les entreprises, de conserver les documents du marché et de former le personnel à ce genre de risque.
Finalement, l’Autorité de la concurrence invite les pouvoirs adjudicateurs à la contacter en cas de suspicion d’entente illégale.
Toutefois, il n’est pas certain qu’en cas de plaintes, l’Autorité sera à même d’assurer la pleine effectivité des règles qu’elle vient d’édicter dans la mesure où ayant des ressources humaines limitées, elle doit actuellement concentrer toutes ses équipes sur les dossiers de concentration d’entreprises suite à des notifications de projets d’acquisitions de société ou de fusions.
Compte tenu du risque encouru tant pour les candidats que pour les pouvoirs adjudicateurs, il est conseillé de se renseigner adéquatement afin de prendre les mesures de protection nécessaires. En ce qui concerne le pouvoir adjudicateur, il peut s’agir de suspendre l’organisation de la procédure d’un marché public, voir de l’annuler. Du côté d’un candidat, il peut être question de mettre fin à tout contact avec un ou plusieurs candidat(s) potentiel(s) ou, dans le cadre d’offres conjointes, d’encadrer ces contacts par la conclusion d’accords de confidentialité.
Annabelle Lepièce, Partner, annabelle.lepiece@cms-db.com